vendredi 1 décembre 2017

Lutter contre la violence...masculine


La parole s'est libérée et c'est déjà une grande victoire. Dans un élan de solidarité internationale, un nombre incroyable de femmes ont apporté le témoignage de leur harcèlement, agression sexuelle voire même de leur viol. Bravo à toutes ces femmes qui ont fait preuve d'un très grand courage.

De ce mouvement libérateur est né de nombreuses initiatives de lutte contre les violences faites aux femmes. Actions politiques - avec notamment l'annonce des nouvelles mesures d'Emmanuel Macron  - mais aussi citoyennes et associatives. Un premier tabou a été brisé et il est désormais devenu audible par tou.te.s. 

Mais ce mouvement nous concerne-t-il tou.te.s ? Qu'en est-il des hommes victimes de violence sexuelle ? 

Il n'est pas réellement question ici des hommes victimes de violences faites par les femmes car les chiffres restent marginaux : sur une année, 6 femmes sont condamnées pour viol sur des personnes de plus de 15 ans (victimes femmes et hommes) contre 765 hommes.  Soit moins de 1% des condamnations ! (1)

Par contre, ce sont près de 14 000 hommes, de 18 à 75 ans, qui sont victimes de viol ou d'une tentative (1). Et ce n'est pas rien. La parole ne s'est malheureusement pas encore libérée pour ces hommes, comme si notre société n'était pas encore prête à entendre ce tabou ultime. 

Les violences sexuelles ne sont donc pas uniquement perpétrées par des hommes sur des femmes mais elles le sont aussi sur des hommes. Et in fine, le véritable sujet est-il réellement du traitement de la violence sexuelle sur les femmes ou de la violence sexuelle tout court ? Et si on avait le courage de se regarder en face et de voir que le problème de la violence sexuelle est principalement d'origine masculine?  

Les hommes qui harcèlent, agressent et violent. Voilà le vrai sujet à traiter. 

Nous ne pouvons pas nous borner à ne traiter ce problème que sous l'unique prisme des femmes victimes. C'est à la fois une discrimination sexuelle et une manière de se conforter dans un profond déni social. Et c'est le meilleur moyen pour ne rien solutionner du tout. Car tant que nous ne verrons pas la véritable cause de notre problème, nous ne pourrons le résoudre. 

Et il y a tout une sémantique très significative derrière tout cela. Il y a une différence fondamentale entre dire "lutter contre les violences faites aux femmes" et "lutter contre la violence masculine". On passe du protagoniste de la victime - et une fois de plus uniquement féminine - à celui de l'agresseur masculin. On se penche alors non plus sur la femme victime mais sur l'agresseur masculin, sa responsabilité dans l'acte de violence, les raisons qui l'ont poussé à agresser et devenir un prédateur. 

Ce n'est qu'à ce moment précis que l'on pourra s'emparer du véritable problème de fond, on pourra alors sortir de la culture du viol et du débat sur la manière dont nous les femmes nous nous habillons, à quelle heure nous sortons le soir, accompagnées ou non, etc. Il s'agira alors de remettre la responsabilité sur le prédateur et non sur la victime et le prisme par lequel nous observons tout cela est d'une importance capitale. Le débat n'est pas de savoir ce que font les femmes ou pas lors de leur agression mais uniquement : pourquoi cet homme a-t-il agressé sexuellement cette femme ? Pourquoi et comment un homme de 30 ans peut-il avoir envie d'avoir une relation sexuelle avec un.e mineur.e de moins de 15 ans ? Pourquoi l'a-t-il manipulé.e ? Est-il sain d'esprit ? C'est ça, le véritable débat. 

Et ce n'est qu'à ce moment que l'on pourra réellement débattre des fondements de cette violence sexuelle pour mieux l'apprivoiser dans l'espoir de prévenir mais aussi de guérir tou.te.s ensemble, victimes et agresseurs. 


(1) source : http://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/hce_avis_viol_2016_10_05-2.pdf



samedi 4 mars 2017

Patrick Perna - Fiché agresseur sexuel et condamné


L’association NOPE est née de la rencontre de 2 femmes, victime et témoin, de l’agent PERNA Patrick. Vous trouverez ci-dessous un extrait du compte rendu du procès qui a été initié, vécu et suivi dans son intégralité par les fondatrices de l’association.  


« Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et contradictoirement à l’égard de PERNA Patrick » et des victimes, 
« Sur l’action publique : 
Déclare PERNA Patrick coupable des faits qui lui sont reprochés pour les faits de :
AGRESSION Sexuelle commis entre 2011 et 2013 à Paris
Condamne PERNA Patrick à un emprisonnement délictuel de DEUX ANS ; 

Vu l’article 132-41 et 132-42 al.2 du code pénal ;

Dit qu’il sera SURSIS PARTIELLEMENT pour une durée d’UN AN, à l’exécution de cette peine, AVEC MISE A L’EPREUVE dans les conditions prévues par les articles 132-43 et 132-44 du code pénal ;
Fixe le délai d’épreuve à DEUX ANS ».

(…)

Le tribunal déclare que « ce sursis est assorti des obligations suivantes : 
  • Vu l’article 132-45-3° du code pénal : se soumettre à des mesures d’examen, de contrôle, de traitement ou de soins médicaux même sous le régime de l’hospitalisation
  • Vu l’article 132-45-5° du code pénal : ordonne à l’encontre de PERNA Patrick d’indemniser les parties civiles
A l’énoncé du jugement et en application des articles 132-40 et suivants du code pénal, le prévenu a pris connaissance et a reçu copie contre signature du procès-verbal de notification des obligations du sursis mise à l’épreuve auquel il a été condamné. 

La présidente, en application de l’article 706-53-2 du code de procédure pénale, a constaté l’inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles de PERNA Patrick et lui a notifié les obligations lui incombant pendant la durée de cette inscription.

La présidente l’a également informé des sanctions dont il serait passible s’il venait à se soustraire aux mesures ordonnées. »

> Source officielle : Compte rendu du JUGEMENT CORRECTIONNEL à l’audience publique du Tribunal Correctionnel de Paris le VINGT-TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE. 

A noter, que les témoignages des 2 plaignantes ont été supportées par le témoignage de plus d’une trentaines de témoins entendus dans le cadre de l’enquête préliminaire. Nous remercions chacune d'entre elles, pour leur immense courage et leur témoignage dans le cadre de cette enquête. 


Le procès et son enquête ont permis de mettre en lumière de très nombreux témoignages concordants sur la personnalité d’agresseur sexuel de cet « agent artistique » PERNA Patrick. L’association NOPE continuera d’accompagner les personnes qui souhaiteraient encore témoigner ou porter plainte. Car il est et il sera toujours temps que chacun.e des victimes fasse exercer ses droits et obtienne justice.


samedi 14 juin 2014

Un spectacle affligeant




Le Festival de Cannes se ferme et laisse derrière lui un champ de rêves et d’envies cinématographiques infinies. On cite déjà allègrement Xavier Dolan et son « Accrochons-nous à nos rêves car nous pouvons changer le monde par nos rêves ». Et voilà. Tout est dit : le rêve. Le rêve de réussir, d’aimer mais surtout d’être aimé en retour, et d’avoir la chance d’appartenir à la crème de l’élite cinématographique française.

Nous sommes galvanisés. Que d’étoiles dans nos yeux et tellement de paillettes, d’envie de réussir et d’être la star de demain. Moi aussi je veux être aimé, que dis-je, adulé ! Mais ce que les stars se cachent bien de dire, c’est ce qu’elles ont enduré pour en arriver là. Je ne parle même pas des périodes de galère, de chômage, de petits boulots sous payés, quand encore ils avaient la chance de l’être ; mais plutôt de harcèlement. D’agressions sexuelles. Hommes et femmes confondus. Car oui, cela existe aussi pour les hommes et dans ce milieu, bien plus souvent que l’on ne croit.

Les comédiens et comédiennes les plus connus, sont des personnes que la majorité de la population aime, admire, prend en exemple. Mais pas seulement. Les comédiens doivent nous faire fantasmer. Car nous sommes dans le monde de l’image, du paraître. Et ça, les agents, producteurs, réalisateurs, (…) l’ont bien compris.

Je me souviens lorsque j’étais étudiante au Cours Florent, ce que l’un de nos profs avait pour habitude de nous dire : « Pour mieux vous guider, je veux savoir comment vous mangez, comment vous souffrez et comment vous baisez ». Bon, ben ça, c’est dit. Et ça, c’est sans parler des innombrables scènes de séduction, d’amour, de sex, que nous avions à travailler. Ma toute première d’ailleurs fut une scène de viol. Ah oui, c’est vrai. En fait si je me souviens bien, les scènes que l’on me demandait de travailler étaient soit des scènes où je me faisais abuser sexuellement, soit des scènes où mon personnage devait séduire un homme. Une fois même, mon prof m’a demandé de retirer mon soutien gorge car il trouvait qu’on ne voyait pas assez que j’étais excitée.

Je me pose deux questions. La première est : pourquoi devais-je toujours jouer des scènes où la femme était assimilée à un objet sexuel ? Et puis la deuxième, c’est : pourquoi les femmes acceptent-elles de jouer ces rôles si grossiers et réducteurs ? Pourquoi moi même ai-je arrêté ? Ah oui, parce qu’un pseudo-agent artistique m’a harcelée sexuellement.

Et donc, sans transition, on aborde le sujet de l’abus. Vous comprendrez ici que lorsque l’on joue un rôle, on doit aussi donner tout ce que l’on a, faire un réel travail de lâcher prise afin de pouvoir jouer ce genre de personnages. Et là, ici, à ce point précis, en ce lieu même, se trouvent les prédateurs : ceux qui se prétendent être des professionnels et qui n’attendent qu’une chose, abuser de vous !

Ces prédateurs utilisent la complexité du travail de comédien – qui joue un rôle et qui donc n’est pas censé se faire réellement violer, par exemple – pour mettre les comédiens dans ses situations humiliantes, violentes et surtout, une fois que ces derniers se trouvent dans une position où ils sont personnellement vulnérables, qu’ils se mettent en danger ; les prédateurs attaquent. Mais pas dans le jeu. Cette fois-ci, on est bel et bien dans la réalité. C’est comme ça que des comédiennes qui vont passer un casting et qui doivent jouer une scène d’amour, vont tout simplement se retrouver dans une situation de harcèlement ou d’agression sexuelle. Car cela est facile. Le comédien, la comédienne, se met à nu, dans tous les sens du terme. La personne devient vulnérable dès qu’elle doit faire un lâcher prise et se laisser guider par un réalisateur ou un metteur en scène. Et quand un prédateur sexuel se cache derrière l’un deux, alors il est très facile d’abuser et de changer des vies à jamais.

Alors ne rêvez pas trop du monde du spectacle, du cinéma ou même du métier de comédien(ne). Ce n’est pas toujours ce que l’on croit. Pour ma part, et c’est un constat consternant, je peux affirmer que la majorité des comédiens et des comédiennes que j’ai rencontré ont, à un moment donné, dû faire face à une situation de harcèlement ou d’agression sexuelle. On est bien loin des strass et des paillettes claquantes de la Croisette. Car oui, le véritable spectacle dans le monde du cinéma et du théâtre est bien trop souvent un spectacle affligeant.



Ce qu'on veut bien nous faire voir!

Parlons un peu du milieu du spectacle,  appelé aussi monde de l'image, car celle-ci y occupe une place importante... Peut-être même trop importante! Dans ce milieu, l'apparence prend de plus en plus,  un bien grand rôle, laissant également place au pouvoir de manipuler.

Lorsque vous vous apprêtez à entrer dans ce milieu, en tant qu'interprète (comédiens, mannequins,  etc...) et surtout en tant que femme, on vous bassine déjà sur l'importance que doit prendre votre apparence dans ce milieu. Être toujours plus désirable pour augmenter votre chance de réussir. On commencera même très vite, que ce soit en formation, sur des premiers castings, ou lors de soirée networking, par demander aux femmes de savoir marcher en talon et en robe... Ça commence naturellement comme cela, mais de fil en aiguille, on tombe dans l'engrenage. Suite à une rencontre professionnelle, vous êtes censés être jugés sur votre motivation, sur votre aptitude et vos capacités à évoluer dans le MÉTIER que vous avez choisi de faire. Mais la réalité est tout autre. On vous jugera sur votre physique et votre capacité à séduire, transformant ainsi des castings en scène de séduction, et des soirées de networking en soirées débauche...

Le public lui, est de plus en plus habitué à ça. Que ce soit en affiche, dans les médias, à la télé ou encore au cinéma, on lui vendra encore et encore, du joli et du désirable, jusqu'à même lui faire croire qu'il vaut mieux que le "produit" soit superficiel que talentueux. Quant à ceux qui n'aiment pas, ils préféreront se dirent que là dedans il n'y a que des imbéciles, naïfs et faciles, et que tout ne marche qu'au physique et "à la baise"...

Seulement tout ceci n'est qu'un énorme scandale. C'est ce qu'on veut bien faire croire à tout le monde, faire croire aux artistes comme au public, que derrière son écran, c'est l'image qui vend... Et pourquoi ne pas hésiter à abuser d'avantage, comme ça se fait déjà et ce depuis des lustres, de cet étrange phénomène, à savoir, ces produits sont beaux mais jusqu'à quels points sont-ils désirables? Et allez hop! Laissons aussi place au droit de cuissage "savoir coucher" pour augmenter ses chances de réussite, et pour que l'image prenne encore plus de place dans la société... Une image qui va être bafouée car il s'agit de l'image d'un être humain qui à la base voulait seulement vivre du métier de ses rêves... Une image, des rêves et une vie bafoués car ce mode de fonctionnement est destructeur. Il y a derrière les coulisses bon nombres de victimes qu’on saura bien vous cacher...

Des victimes qui ne savent parfois même pas qu'elles le sont... Victimes d'un faux mode de fonctionnement, de l'image qu'on va rejeter d'eux-mêmes dans la société,  à savoir qu'on entendra d'elles qu'elles sont naïves, ou encore prêtes à écarter les cuisses pour avoir un rôle, victimes de la normalisation de tout ça, et de bien d'autres atrocités.

Être artiste c'est un métier! Dans aucun métier on ne doit juger de ce qui fait votre intimité! Le fait que votre métier se trouve dans le milieu de l'image ne doit pas entraver cette règle! Personne, et sous aucun prétexte ne doit vous abaisser au rang de produit désirable et vendable, et encore moins sous le rang d'objet. Chez NOPE on s'y refuse!

dimanche 25 mai 2014

Hérésie



Lorsque l’on parle d’agression sexuelle, il y a les victimes, les coupables et tous les autres. Le reste du monde. Ceux qui lisent les infos, les relayent, les like, les twitte et qui se permettent de le juger à la va vite, entre deux changements de métro ou à la pause déjeuner.

Lorsque l’on parcourt les commentaires laissés en ligne par des personnes à l’altruisme douteux, nous sommes souvent en tant que femmes, choquées. Et encore plus pour les femmes qui ont été victimes d'agression sexuelle. Choquées par l’amalgame frappant entre victime et bourreau. ‘Elle a dû le chercher pour qu’il lui arrive ça’, ‘elle espérait quoi en rencontrant quelqu’un dans un bar ?’, ‘encore une fille qui ne sait pas s’habiller’, enfin bref, des exemples on en trouve à la pelle.

La question que je pose ici, c’est pourquoi ? Qu’est-ce qui s’est passé dans la vie de ces personnes pour porter un tel jugement ?

Alors maintenant, demandons-leur d'imaginer que ce soit quelqu’un de leur famille, une sœur, une tante, une cousine voire leur propre mère ou propre fille, leur meilleure amie qui se soit faite agresser. Une personne proche. Penseront-ils par principe, enfin, sous prétexte que c’est une fille, qu’elle ait demandé à ce qu’une telle chose lui arrive? Qu’elle ait pu à un seul moment donné dans sa vie, cherché ouvertement à subir un tel acte ? Ou est-ce par simple plaisir de juger des personnes qu'ils ne connaissent pas et par extension, de classer toutes les personnes de sexe féminin dans la catégorie des ‘filles qui l’ont bien cherché’ qui leur donne entière satisfaction ?

Pensent-ils un seul instant que quoique ce soit vienne excuser une atteinte à la dignité humaine ? Si tel est le cas, alors il est temps de regarder en soi-même pour essayer de retrouver une quelconque trace d’humanité. 

Car le sujet n’est pas la manière dont les femmes s’habillent, ni les sorties qu’elles font. Si tel était le cas, cela supposerait que nous les femmes, ne sommes pas libres de nous habiller comme nous le souhaitons, ni d’aller librement dans les lieux publics comme les hommes. Devrions-nous aussi songer à arrêter de sortir en bar ou en boite de nuit, car cela est trop provocant ? Le fait de se montrer aux yeux des hommes, ne serait en fait qu’une puissante provocation sexuelle dont vous, les hommes, n’êtes que les impuissantes victimes ? Donc en fait, quand des hommes violent ou abusent sexuellement des femmes, ils subissent tout simplement une situation volontairement provoquée par le joug prédateur des femmes ?

Mais quelle hérésie. J’ose espérer que la seule chose qui justifie ce parjure soit la peur. La peur au ventre. Celle qui les force à croire que de telles atrocités ne peuvent exister et qui les pousse à faire la politique de l’autruche.

Car la vérité vraie vient des faits, celle rapportée par les chiffres. Entre 2010 et 2011, 154 000 femmes ont déclaré avoir été victimes de viols et 16% des femmes déclarent avoir subi des rapports forcés ou des tentatives de rapports forcés au cours de leur vie. 

Qu’on se le dise, ces chiffres, déjà bien trop élevés, ne prennent en compte que les femmes qui osent parler et témoigner...