dimanche 25 mai 2014

Hérésie



Lorsque l’on parle d’agression sexuelle, il y a les victimes, les coupables et tous les autres. Le reste du monde. Ceux qui lisent les infos, les relayent, les like, les twitte et qui se permettent de le juger à la va vite, entre deux changements de métro ou à la pause déjeuner.

Lorsque l’on parcourt les commentaires laissés en ligne par des personnes à l’altruisme douteux, nous sommes souvent en tant que femmes, choquées. Et encore plus pour les femmes qui ont été victimes d'agression sexuelle. Choquées par l’amalgame frappant entre victime et bourreau. ‘Elle a dû le chercher pour qu’il lui arrive ça’, ‘elle espérait quoi en rencontrant quelqu’un dans un bar ?’, ‘encore une fille qui ne sait pas s’habiller’, enfin bref, des exemples on en trouve à la pelle.

La question que je pose ici, c’est pourquoi ? Qu’est-ce qui s’est passé dans la vie de ces personnes pour porter un tel jugement ?

Alors maintenant, demandons-leur d'imaginer que ce soit quelqu’un de leur famille, une sœur, une tante, une cousine voire leur propre mère ou propre fille, leur meilleure amie qui se soit faite agresser. Une personne proche. Penseront-ils par principe, enfin, sous prétexte que c’est une fille, qu’elle ait demandé à ce qu’une telle chose lui arrive? Qu’elle ait pu à un seul moment donné dans sa vie, cherché ouvertement à subir un tel acte ? Ou est-ce par simple plaisir de juger des personnes qu'ils ne connaissent pas et par extension, de classer toutes les personnes de sexe féminin dans la catégorie des ‘filles qui l’ont bien cherché’ qui leur donne entière satisfaction ?

Pensent-ils un seul instant que quoique ce soit vienne excuser une atteinte à la dignité humaine ? Si tel est le cas, alors il est temps de regarder en soi-même pour essayer de retrouver une quelconque trace d’humanité. 

Car le sujet n’est pas la manière dont les femmes s’habillent, ni les sorties qu’elles font. Si tel était le cas, cela supposerait que nous les femmes, ne sommes pas libres de nous habiller comme nous le souhaitons, ni d’aller librement dans les lieux publics comme les hommes. Devrions-nous aussi songer à arrêter de sortir en bar ou en boite de nuit, car cela est trop provocant ? Le fait de se montrer aux yeux des hommes, ne serait en fait qu’une puissante provocation sexuelle dont vous, les hommes, n’êtes que les impuissantes victimes ? Donc en fait, quand des hommes violent ou abusent sexuellement des femmes, ils subissent tout simplement une situation volontairement provoquée par le joug prédateur des femmes ?

Mais quelle hérésie. J’ose espérer que la seule chose qui justifie ce parjure soit la peur. La peur au ventre. Celle qui les force à croire que de telles atrocités ne peuvent exister et qui les pousse à faire la politique de l’autruche.

Car la vérité vraie vient des faits, celle rapportée par les chiffres. Entre 2010 et 2011, 154 000 femmes ont déclaré avoir été victimes de viols et 16% des femmes déclarent avoir subi des rapports forcés ou des tentatives de rapports forcés au cours de leur vie. 

Qu’on se le dise, ces chiffres, déjà bien trop élevés, ne prennent en compte que les femmes qui osent parler et témoigner...



dimanche 18 mai 2014

Quel est le but de notre association ?


« NOt a PuppEt », aussi nommée NOPE, est une association ayant pour but de lutter contre toute forme d'abus (agressions, violences physiques, morales et sexuelles) dans le monde du spectacle.


Petit rappel : qu'est-ce qu'une agression sexuelle ? 

Une agression sexuelle est un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis sans le consentement de la personne visée, par manipulation, abus de pouvoir, menace et utilisation de la force. Une agression sexuelle est avant tout un CRIME, car il porte atteinte à la psychologie, au physique et à la sécurité de la personne. 

La loi du 6 Aout 2012 sur le harcèlement sexuel a permis de redéfinir le champ d'action de la loi. Qu'il soit répété ou un cas isolé, la nouvelle loi permet d'étendre la reconnaissance d'harcèlement sexuel à de nombreuses situations et agissements. Ainsi : 

"Le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui : 
- portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant
- créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
Est également assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave, dans le but réel d'obtenir un acte de nature sexuelle, pour soi-même ou pour un tiers". 


Il en est de même pour l'agression sexuelle et le viol, qui sont, comme pour le harcèlement, punis par la loi. En 2010, ce sont près de 1356 condamnations pour viol qui ont eu lieu en France et 8235 condamnations pour atteintes sexuelles. A noter qu'entre 2010 et 2012, 83 000 femmes ont été victimes de viol ou de tentative de viol. 


Même si la majorité des victimes sont des femmes (un peu plus de 80%), il ne faut pas oublier que les agressions sexuelles touchent aussi les hommes et malheureusement n’importe qu'elle personne, sans distinction d’orientation sexuelle, ni même d’âge.

Pourquoi le monde du spectacle ? 

Car c'est encore et toujours un sujet tabou, mais bon nombre de prédateurs sexuels se cachent derrière les strass et paillettes du monde du spectacle. Fréquentant cet univers de très près, nous avons pu constater que ce problème est bien trop présent. Nous les artistes, nous avons tous du, à un moment donné dans notre carrière, faire face à du harcèlement sexuel tel que décrit ci-dessus. Mais pourtant ce sujet reste encore et toujours tabou, ou pire encore, il est très régulièrement normalisé.

Les histoires de « coucheries » sont dans ce secteur de notoriété commune. Mais savez-vous vraiment de quoi il s'agit concrètement ? Bien trop souvent, cet adage réducteur n’est là que pour camoufler voire étouffer un nombre inimaginable d’agressions et d’abus sexuels. Car des propositions pour coucher et réussir, on y a tous eu droit, hommes ou femmes. Et contrairement aux idées reçues, la majorité des artistes ne couche pas pour réussir, non. Alors pourquoi cette réputation continue-t-elle de coller à la peau de ce milieu ? Car celui qui colporte et qui prétend avoir couché avec tel(le) comédienne ou tel(le) mannequin essaie seulement de camoufler le fait qu’il a fait pression pour arriver à ses fins. Car voyez-vous, dans ce milieu, beaucoup de personnes ferment les yeux sur les limites pourtant tangibles du « je veux » et du « je ne veux pas ». Force est de constater que pour eux, c’est un droit qu’ils se prennent sur notre propre personne. Ce droit selon eux, s’appelle un droit de cuissage.

Il est inimaginable qu’en 2014 des personnes aient encore peur de parler et de punir ces actes odieux. Nous, chez NOPE, nous disons NON. Non au droit de cuissage, non à toute forme d’abus, de pression, de manipulation, physique, sexuelle et/ou morale. Rien ni personne ne peut contraindre une autre personne de faire une chose qu’il ou elle ne désire pas, par des moyens directs ou détournés : cela est puni par la loi. Appliquons la, parlons-en, sortons du silence et faisons en sorte que la loi punisse ceux qui se croient encore intouchables. 

Sortez du silence, vous n’êtes pas seul(e)s. C’est grâce à une action collective que tous ensemble nous redonnerons un peu de magie au monde du spectacle.